Après une semaine passée en
haute altitude, Bikellissima is back !
J’ai profité de mon gain
éphémère en globules rouges pour aller taquiner les routes vallonnées de ma
Bourgogne natale. Mon week-end de Pâques a donc été l’occasion de sillonner les
routes entre Beaune et Gevrey-Chambertin en passant par les Hautes-Côtes. Et je
dois dire que l’altitude et le snowboard à haute dose chaque jour m’ont été
plus que bénéfiques : j’ai ainsi avalé deux jours de suite et à chaque fois
environ 55km, jusque-là rien de très spectaculaire, mais avec à chaque fois 900
mètres de dénivelé entre vignes, Hautes-Côtes et combes de l’arrière pays
nuiton. Pour ceux qui ne me croient pas, performances à l’appui sur Strava !
Ce que je n’avais pas prévu
en revanche en cette fin mars-début avril était de devoir composer avec des
températures très fraiches et un vent glacial. En avril, ne te découvre pas
d’un fil, est-il coutume de dire, oui mais quand-même !
Seule, de bon matin et sans
protection face au vent, j’ai véritablement pris la mesure des conseils de mes
amis cyclistes, qui me répètent qu’il vaut parfois mieux faire l’effort pour
aller raccrocher un wagon de cyclistes pour se mettre à l’abri que d’affronter
le vent de face seule et sans protection. Parce qu’avec mes 45 kilos et mon vélo
trimballé un coup à gauche, un coup à droite par un vent tournant, je me suis
sentie collée à la route vulnérable et
j’ai compris ce qui a bien pu arriver à Andy Schleck il y a près d’un an
au Dauphiné, lorsqu’une rafale l’a envoyé valser comme une simple feuille dans
le fossé.
Je me suis alors surprise à
prier la nature, le destin, le dieu du vélo s’il existe, enfin tout et
n’importe quoi en somme pour qu’un cycliste jaillisse derrière moi et me
protège du vent.
Les dieux m’ont entendu
quand au plus dur de l’effort (pas en montée, j’aime ça mais sur un faux plat
montant, tout ce que je déteste) un cycliste de 80 kilos tout en muscles m’a
soudain dépassée. J’ai alors tout tenté –si si je vous assure- pour m’accrocher
derrière lui sans y parvenir et le désespoir m’a presque gagnée quand il m’a
pris, presque sans effort et rapidement, plusieurs centaines de mètres.
Là, la seule chose ou presque qui m’a fait tenir a été de penser à une de
mes idoles sur roues. La veille, Fabian Cancellara a terminé de manière
héroïque le tour des Flandres seul, face au vent et à plus de 50 km/h. Quelle
performance, Spartacus est bien de retour !
Et j’ai aussi compris autre
chose pendant ces deux jours d’équipées solitaires. Nous, les femmes, sommes, paraît-il, multitâches, et il semblerait que nous pouvons penser et faire mille
choses à la fois. Cela peut être très utile dans certaines circonstances mais
dans d’autres cela peut aussi être fatal. Cette faculté nous donne en
effet la possibilité d’anticiper. Mais
en vélo, quand vous êtes seule face au vent, que vous avez froid alors que vous
avez à peine couvert 20 km, si vous commencez à anticiper à penser aux
difficultés à venir, il est plus que certain que vous abandonnerez et que vous
appellerez à la maison pour que votre voiture balai familiale vienne vous
chercher.
C’est à peu près la même
chose en snowboard : lorsque vous voulez par exemple prendre une bosse un peu
pêchue, si vous pensez à la chute possible, vous ne vous lancerez jamais ou
alors vous le ferez avec tellement d’hésitation que la chute sera bien au
rendez-vous.
Pensant à ce que Fabian
avait dû endurer mais aussi à la détermination et la motivation ultime qui
devaient l’habiter pour revenir au plus haut niveau, j’ai donc laissé de côté
mon cerveau féminin et ai décidé d’affronter chaque difficulté l’une après
l’autre, sans anticiper sur la prochaine et en appréciant la joie d’être seule
et en pleine nature, un moment propice pour faire le point sur soi.
Au fil de la route des Grands Crus, on pourrait avoir envie de remplir son bidon d'un fin nectar mais le paysage a déjà le don d'adoucir l'effort... |
Ce changement d’attitude
m’a permis d’atteindre mes objectifs mais aussi d’oser attraper le bas du
guidon et me mettre en vraie position de descendeuse et enfin atteindre les
plus de 50 km/h en descente. Quand vous faite 45kg, c’est un exploit lorsque
la pente est à moins de 20% !
Je ne suis pas peu fière,
pourtant je me dis qu’il y a encore beaucoup de travail avant d’être prête pour
l’Etape du Tour. Mais chaque chose en son temps, ce sera désormais ma nouvelle
façon de penser à vélo. L’objectif du moment est pour dans moins de trois
semaines : il s’agit de Liège-Bastogne-Liège dans sa version courte soit
environ 80 km et 1200 mètres de dénivelé. Je dois encore travailler, c’est
certain, mais les dernières sorties ont confirmé que je serai prête au moins pour cet objectif.
Comme quoi, il est bon de
savoir de temps à autre emprunter à mes homologues masculins leur façon de
penser.
Pour autant, si un jour je
parviens à monter sur un podium, je ne mettrai pas la main au «paquet» de
l’officiel qui me remettra un bouquet de fleurs pour célébrer l’événement. Je
fais évidemment référence à l’attitude stupide de Peter Sagan sur le podium du
Tour des Flandres.
Certains d’entre vous me
diront que, peut-être, je dénigre Sagan parce que je suis fan de Cancellara, qui
lui-même ne porte pas le Slovaque dans son cœur. C’est sans doute un peu vrai
mais ce n’est pas le sujet.
Voyons à part à votre
épouse/copine (et encore !), pour faire une simple petite blague, oseriez-vous
messieurs vraiment mettre la main aux fesses de la première collègue qui passe
à côté de vous ? Sûrement pas ! C’est pourtant l’excuse débile qu’a trouvé
Peter Sagan. Mais que s’est-il passé dans la tête du Slovaque pour en arriver à
faire un geste qui le déshonore autant que la jeune femme qu’il a touchée sur un
podium cycliste international? Je n’ai pas trouvé la réponse à cette question,
c’est sans doute pourquoi il m’a fallu plusieurs jours pour tenter de digérer
le geste.
Il n’est aujourd’hui
toujours pas digéré, ni excusé. Il n’est pas non plus ici question de stigmatiser
le comportement masculin. Certaines féministes acharnées seraient tentées de
dire que c’est la preuve que le cerveau masculin est situé bien bas. C’est un
peu trop facile comme il est faux dans l’absolu de dire que toutes les femmes
savent faire dix choses en même temps mais n’ont, par exemple, pas le
sens de l’orientation. Pour ma part, je gamberge à propos de mille choses, mais
je ne suis pas une vraie machine multitâches et donnez-moi une carte, je vous
emmène au bout du monde sur le bon chemin et sans GPS!
Il y a des imbéciles partout, autant sans doute chez les hommes que chez les femmes et c’est par leur faute que les préjugés ont la vie dure. Le portail internet britannique dédié aux cyclisme féminin Total Women’s Cycling a d’ailleurs noté plus grave que le geste de Sagan : les commentaires l’encourageant dans sa performance mal placée qui ont suivi sur le blog du Slovaque.
Lorsqu’un personnage devient
médiatique, il doit particulièrement adopter un comportement décent parce qu’il
est susceptible d’inspirer d’autres personnes.
Il me faut également
ajouter à ce stade que Sagan, avec son geste ridicule, a fait du tort aux
cyclisme féminin : la plupart des médias n’ont parlé que de son geste,
éclipsant un peu la performance de Cancellara mais surtout totalement celle de
Marianne Vos, qui elle aussi a remporté avec panache le Tour des Flandres et ce pour la première fois.
Bikellissima a encore du travail avant de
parvenir à faire changer, ne serait-ce qu’un tout petit peu, les choses. Je
profite d’ailleurs de ce post pour remercier d’ores et déjà les quelques
fidèles lecteurs du blog à qui je promets de ne rien lâcher !
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